(…Suite)
Collaboration avec Alfred Hitchcock
Herrmann a donc composé la musique de presque tous les films d’Hitchcock, de Mais qui a tué Harry (1955) à Pas de printemps pour Marnie (1964), une période qui inclut Vertigo, Psychose, La mort aux trousses et bien d’autres. La musique de L’homme qui en savait trop (1956) n’est qu’en partie composée par Bernard Herrmann.
Une des musique les plus connues de Bernard Herrmann est celle de Psychose. De façon inhabituelle pour un thriller ce score n’utilise que les cordes de l’orchestre. La fameuse séquence de violons aiguës martelés pour la séquence de meurtre est un des moments les plus célèbres de l’histoire de la musique de film.
Sa partition de Vertigo est, à juste titre, considérée comme un chef d’oeuvre. Dans plusieurs des scènes clés du film, Hitchcock laisse la musique prendre un rôle central. Les mélodies en écho au Liebestod du Tristan et Isolde de Richard Wagner évoquent l’amour obsessionnel et morbide qu’éprouve le personnage principal pour la femme qu’il essaie de modeler à l’image d’une défunte.
Un des aspects les plus notables de la partition, ce motif de deux notes descendant de mauvais augure est une imitation directe des deux notes émises par les cornes de brûme situées de part et d’autre du Golden Gate Bridge, à San Francisco. Ce motif est en lien direct avec l’action du film car on peut l’entendre clairement, émis par les cornes de brume, au moment où Kim Novak se jette dans la baie non loin du pont.
Herrmann regrettera de ne pouvoir diriger l’enregistrement qui sera confié à Muir Mathieson en Angleterre. Il mettra toujours un point d’honneur à diriger lui-même ses propres compositions de cinéma.
Plus tard, Herrmann déclarera à propos du contrôle créatif de sa musique au cinéma: « Je possède la décision finale sinon je ne fais pas la musique. La raison pour laquelle j’insiste toujours sur ce fait est que, à la différence d’Orlon Welles, un homme d’une grande culture musicale, la plupart des autres réalisateurs sont, par rapport à la musique, comme « des enfants perdus dans un bois ». Si vous suivez leurs goûts, la musique sera abominable. Il y a des exceptions. J’ai travaillé sur un film, « Tous les biens de la terre« , dirigé par un merveilleux réalisateur, William Dieterle. Il était aussi un homme de grande culture musicale. Hitchcock, quant à lui, est un homme d’une grande sensibilité, il me laisse tranquille. Car si je dois faire ce que le réalisateur dit, je préfère ne pas faire le film. Je trouve que c’est impossible de travailler de cette façon. »
Il déclarera également, qu’Hitchcock augmentait ou diminuait la durée de certaines scènes en fonction de son avis et de la durée de ses musiques.
La rupture
Les relations avec Hitchcock prirent fin d’une façon abrupte lors du désaccord sur la musique du Rideau déchiré. Subissant de façon répétée les pressions des producteurs, Hitchock voulait une partition plus jazz et même carrément pop. Selon son biographe, Patrick McGillian, Hitchcock était terrifié par l’idée de devenir démodé. Il demanda, donc, à Bernard Herrmann de composer une musique en ce sens, ce que celui-ci accepta.
Hitchcock à l’écoute du premier thème de la musique convoqua Herrmann en refusant celle-ci et en réitérant sa demande pour une partition plus « actuelle ». Ce dernier lui répondit, fidèle à lui-même: « Écoute Hitch, tu ne peux pas courir plus vite que ton ombre. Tu ne fais pas des films pop. Que veux-tu de moi? Je n’écris pas de musique pop. »
Hitchcock insista longuement en malmenant les principes de Bernard Herrmann quant au contrôle final de sa musique. Celui-ci lui répondit: « J’ai eu une carrière avant toi et j’en aurai une après. »
Les deux hommes ne se revirent plus.
(A suivre…)
Psychose 😀
Vertigo